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«Fonctionnaires incompétents»: un cas de poursuite civile

  28 octobre 2011

(Québec) Ce n'est pas devant un arbitre en relations de travail que la cause sur les déclarations de Régis Labeaume au sujet des «fonctionnaires incompétents» devrait être entendue, mais bien en Cour supérieure, dans une poursuite au civil.

C'est du moins ce qu'a plaidé jeudi l'avocat de la Ville de Québec, André Lepage. Devant l'arbitre Gilles Desnoyers, les deux parties se sont rencontrées jeudi pour la première fois pour discuter du grief déposé par le Syndicat des fonctionnaires municipaux de Québec.

Ce dernier souhaite obtenir réparation pour ses membres qui ont été éclaboussés par les propos du maire, qui les avait qualifiés d'«incompétents», à la suite d'une décision controversée sur la création d'une voie réservée sur Robert-Bourassa. Les dommages réclamés dans le grief s'élèvent à 1,5 million $.

L'avocat de l'employeur a fait valoir que la Ville de Québec n'est nullement concernée dans cette affaire. Les propos tenus par le maire Labeaume n'engagent que lui-même, a-t-il tenté de démontrer. Dans le contexte des faits présentés dans le grief, a exposé Me Lepage, le maire s'adressait à un journaliste du Soleil.

En son nom personnel

Dans ces circonstances, ce n'est pas l'employeur qui parle, mais bien l'élu. «C'est le politicien qui parle. Et le politicien représente les citoyens», a soutenu Me Lepage. Alors qu'il exerce une charge publique, il jouit d'une totale autonomie par rapport à l'instance municipale, plaide-t-il, et la Ville ne peut pas être tenue responsable de ses propos.

Par conséquent, l'arbitre Desnoyers n'a pas la juridiction pour entendre cette cause, a affirmé Me Lepage, et c'est plutôt un recours en diffamation devant la Cour supérieure que le syndicat devrait intenter.

La défense de la Ville a surpris la partie adverse, mais le président du Syndicat des fonctionnaires municipaux de Québec, Jean Gagnon, a trouvé cette thèse «très intéressante».

«Il y a inévitablement une belle question de droit qui se discute ici ce matin [jeudi]. Le maire est-il, oui ou non, un représentant de l'employeur? Si ce n'est pas le cas... Pourtant, dans une annonce de rôtisserie au Québec, il dit que c'est lui qui commande à l'hôtel de ville. Peut-être pas tout à fait vrai. On verra», a-t-il lancé à la sortie de la rencontre.

L'avocat du syndicat, Me Gilles Grenier, a demandé un ajournement pour lui permettre de préparer l'argumentation qu'il opposera à celle de l'employeur. Mais il a déjà annoncé qu'il présenterait une preuve. Les parties ont convenu de se rencontrer de nouveau d'ici décembre. Entre-temps, le syndicat devra par contre décider s'il compte porter cette cause devant la Cour supérieure, car les événements remontent à novembre 2010 et le délai de prescription dans ce type de cause est d'un an.

M. Gagnon n'a pas encore pris de décision à cet effet. Mais il est clair pour lui que cette option représente des coûts importants. «Ça va être très dispendieux pour peut-être peu de résultats. Même si on avait une décision qui le condamne parce qu'il a fait de la diffamation, je ne suis pas là pour dilapider les fonds des membres. Si jamais on en vient à la conclusion qu'on peut aller chercher 5000 à 10 000 $ pour des frais de 300 000 $, on oublie ça.»

Le maire de Québec a refusé de commenter le dossier jeudi. «On va laisser travailler les avocats», s'est-il contenté de dire jeudi matin.


Source :
Le Soleil
Stéphanie Martin
Avec la collaboration d'Annie Morin
Photographie
PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL, JEAN-MARIE VILLENEUVE